Le mardi 9 décembre, une percée significative a été réalisée dans une affaire non résolue depuis près de dix ans. Les enquêteurs de l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) ont procédé à l'interpellation d'un individu de 28 ans, soupçonné d'avoir agressé brutalement une joggeuse à Poitiers (Vienne) en juin 2015. Les faits, marqués par des violences avec un tournevis, ont conduit à une identification récente grâce à des techniques de pointe en matière d'ADN.
Malgré plusieurs années de stagnation dans l’enquête, une réévaluation minutieuse des preuves, combinée à l'expertise de l'équipe spécialisée des cold cases de Nanterre, a permis de faire avancer le dossier. Initialement, un profil ADN de type masculin avait été recueilli sur les effets personnels de la victime, mais son correspondant n'avait jamais été identifié.
Une méthode qui fait ses preuves, inspirée des États-Unis
La clé de cette avancée repose sur la généalogie génétique, une méthode déjà adoptée aux États-Unis, mais qui demeure peu encadrée en France. Aux États-Unis, de nombreuses entreprises permettent aux individus de monter leur arbre généalogique à partir de tests ADN. Les enquêteurs exploitent souvent ces bases de données pour faire correspondre un ADN inconnu avec des ascendances ou des descendants. Ce processus a déjà permis de résoudre plusieurs affaires criminelles aux États-Unis, mais en France, l'utilisation de tests récréatifs reste illégale.
Par le passé, cette méthode a déjà montré son efficacité en France, comme dans l'affaire tristement célèbre du "prédateur des bois", où un ADN non identifié a finalement été mis en relation avec des membres de la famille. La même stratégie a été employée dans l'affaire du "violeur au tournevis", lorsque les autorités françaises ont demandé l'aide des bases de données américaines.
Vers un encadrement légal en France?
Malgré ses résultats probants, la généalogie génétique reste marginale dans les enquêtes françaises en raison de la législation actuelle sur la protection des données. "Les tests récréatifs sont prohibés, et leur commande est passible de poursuites", explique le colonel Francis Hermitte, responsable de la division criminalistique à l'IRCGN. Cependant, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a récemment indiqué la volonté du gouvernement d'encadrer cette pratique pour éclaircir des affaires graves telles que les meurtres ou les viols. En octobre, il a été rapporté qu'une législation pourrait être proposée dès janvier prochain.
Actuellement, le pôle cold cases compte environ 30 affaires qui pourraient être résolues grâce à la généalogie génétique. Cela solde des milliers de traces d'ADN dans le Fnaeg (Fichier national des empreintes génétiques) qui à ce jour, restent inconclusives. Cette précieuse méthode pourrait offrir un nouveau souffle à des enquêtes anciennes et complexes.
Alors que l’opinion publique reste divisée sur la question de la protection des données, plusieurs experts, comme la magistrate Sabine Khéris, estiment que cette législation pourrait sécuriser juridiquement les innovations nécessaires à la résolution de cas criminels non élucidés.







