Au cœur des dunes dorées du désert de Kandahar, un spectacle fascinant s'offre à nous : des véhicules tout-terrain s'élancent avec fracas sur le sable ocre, créant une ambiance électrique chaque week-end. Ce rassemblement insolite attire une myriade de passionnés, établissant un havre d'évasion dans un contexte politique complexe.
"Le désert est un trésor de beauté pour notre province", s'enthousiasme Abdul Qadir, 23 ans, qui tient une boutique dans la ville de Kandahar. La rencontre a lieu non loin du sanctuaire d'Ibrahim Khalifa Baba, un lieu emblématique qui attire un public surtout masculin. Les femmes, elles, sont traditionnellement absentes de ces manifestations. "Les jeunes viennent ici pour se divertir et montrer leurs véhicules", explique Abdul, confortablement installé sur un tapis coloré près d'un feu convivial.
Tandis que les spectateurs admirent les prouesses des conducteurs, ces derniers se lancent dans des courses effrénées à travers les dunes, certains peinant à poursuivre leur ascension. "Ici, nous avons appris à maîtriser nos véhicules, et l'appréhension du novice a disparu", précise Mohammed Rahim, 25 ans, partenaire d'un concessionnaire automobile local et habitué des lieux.
Les conducteurs font vibrer le sol de leurs moteurs rugissants, créant des nuages de sable qui soulèvent l'excitation parmi la foule. Malgré quelques incidents mineurs ou collisions, personne ne semble s'inquiéter des blessures, comme le souligne Haji Abdul Samih, un spectateur régulier qui note : "Les accidents ne sont presque jamais graves ici". Pourtant, il rappelle que dans le pays, les accidents de la route sont une grande cause de mortalité selon l'ONU.
Les véhicules présents, souvent affichés à des prix exorbitants oscillant entre 8 000 et 80 000 dollars, en disent long sur les inégalités économiques qui frappent l'Afghanistan. Alors que près de 45% de la population pourrait nécessiter une aide humanitaire d'ici 2026 (source : Ocha), le contraste est saisissant entre les richesses de certains jeunes et les réalités difficiles de beaucoup d'autres.
Malgré ces disparités, des initiatives comme celles de Haji Abdul Samih mobilisent des jeunes hommes qui, après la fête, se rendent chez des amis moins fortunés. Ils permettent ainsi à des personnes défavorisées de profiter des plaisirs du désert. Ces rassemblements, en plein renouveau, offrent une bouffée d'air frais à une société afghane meurtrie par des décennies de conflits et par le retour récemment des talibans, qui ont imposé des restrictions sévères depuis 2021 sur les loisirs tels que la musique et le cinéma.
À la tombée de la nuit, le ciel s'illumine sous les feux d'artifice, transformant la scène en une célébration vivante et colorée. Ce mélange de passion pour l'automobile, d'adrénaline et de camaraderie de nuit crée un tableau de solidarité et de joie dans un contexte qui en a bien besoin, signe que malgré les tempêtes, la vie continue à Kandahar.







